E-Book, Französisch, 123 Seiten
NOËL Notes Bleues
1. Auflage 2020
ISBN: 978-2-322-24299-3
Verlag: BoD - Books on Demand
Format: EPUB
Kopierschutz: 6 - ePub Watermark
Textes divers & d'été
E-Book, Französisch, 123 Seiten
ISBN: 978-2-322-24299-3
Verlag: BoD - Books on Demand
Format: EPUB
Kopierschutz: 6 - ePub Watermark
Textes divers, parus et inédits. Du même auteur, chez BOD: - Errances - Exquises esquisses - Nathalie et Jean-Jacques Du même auteur, chez Smashwords: - Le point rouge - Jacques Merdeuil - Shiteye Jack, traduit en anglais par Peggy C.
Christophe NOËL a connu un parcours atypique, pratiquant divers métiers: ouvrier tapissier, vendeur ambulant, homme à tout faire dans un petit hôtel, surveillant d'externat, aide-comptable, distributeur de journaux, cadre responsable de centre, intérimaire, représentant, chef des ventes, promoteur publicitaire, visiteur mystère, fonctionnaire. Il est aujourd'hui à la retraite. Curieux, en éveil perpétuel, grand voyageur (surtout à pied et en voiture), il a vécu 12 ans en Grèce de 1969 à 1981, dont il a rapporté une foule de souvenirs. Il a sillonné la France dans tous les sens, puis pas mal de pays européens, occidentaux comme ceux de l'Est après la chute du mur de Berlin.
Autoren/Hrsg.
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Les livres
1ère partie
Quand j’étais tout môme, je ne me suis jamais trop inquiété de livres, me contentant d’illustrés, ou de mon livre de lecture scolaire qui racontait l’histoire d’un garçon dont le père était chauffeur de bus à la RATP avant qu’ils déménagent sur Chamonix (je n’arrive pas à me rappeler le nom des héros ni du livre de lecture). De toute manière, je n’ai pas de souvenir qu’on m’ait lu des histoires au moment du coucher. Plus tard à Athènes, malade cloué au lit, mon père avait quitté son boulot pour se rendre dans LA librairie francophone de l’époque, j’ai parlé du bien connu Kauffmann –pour ceux à qui ce nom évoque quelque chose. C’était un ouvrage de la Bibliothèque Rose, Oui-Oui et le wagon rose. Tu penses si je m’en souviens ! J’avais huit ou neuf ans à l’époque, et mon père avait fait cet incommensurable effort de se rendre dans un temple de la culture, lui qui avait horreur (parce que complexé par son manque d’instruction) pour me le procurer. C’était une preuve d’amour que j’ai évaluée à sa juste valeur. Pourtant, il lisait des romans noirs, qu’il achetait ou échangeait à un bouquiniste sur le marché, quand j’étais tout petit. Sinon, ma mère achetait et lisait des magazines féminins frivoles : Paris Match, Jours de France, etc. J’en dévorais les articles scientifiques sur les insectes notamment –les robes, maquillage et tout le falbala restant ne me concernant en rien. De bibliothèque chez nous, il n’y en avait point. Juste un coin d’une armoire, baptisé pompeusement ainsi, où se battaient en duel trois ouvrages : un Maroussia contant les immensités russes, un condensé de romans de la Sélection du Reader’s Digest –dont je n’ai jamais su comment il avait atterri là et que manifestement personne n’avait jamais ouvert- et que je jugeais inintéressant, enfin un best-seller : le Horsain de Jakez-Hélias, sans doute acheté sur instigation d’un libraire, ou suite à une velléité de se culturer. Mes premières lectures furent donc erratiques. Heureusement, en classe de français, la prof avait-elle organisé une bibliothèque, dont j’empruntais quelques ouvrages ; ceux de la Bibliothèque de l’Institut étant très en dehors de ma portée intellectuelle de gamin. Bien que riche et assez bien fournie, ce qui m’a permis par la suite de documenter des exposés au cours de ma scolarité. Sinon, je dévorais tout écrit qui passait à ma portée. Principalement des illustrés en langue grecque, ce qui m’a permis d’apprendre l’idiome en parfait autodidacte. Je suis tombé aussi, un jour, je me rappelle, sur un Topolino –Mickey en italien. Je suis passé d’ailleurs plus tard à la lecture de romans d’excellents auteurs, tels que Ménélaos Loudémis, que j’adorais. Ado, j’ai eu le bonheur de connaître le Livre de Poche, au prix modique et au format commode. D’excellents profs de Français également, qui m’inculquèrent le goût de la littérature. Goût que je peinais à trouver dans le Lagarde & Michard officiel, très vieille France pincée et surie, qui me semblait rébarbatif à souhait pour décourager des générations de collégiens et lycéens. De même que les lectures obligatoires au programme, comme Eugénie Grandet. Non que l’ouvrage fut inintéressant, mais mon cerveau n’était pas encore assez mûr pour apprécier le génie de Balzac ; et la façon d’appréhender ce texte n’avait rien d’attrayant ; c’étaient des devoirs à n’en plus finir, le plaisir évanoui dans un océan d’ennui et de pensum. Plus tard, j’ai été pris d’une frénésie d’acquisition et de lecture, arrivant à lire une bonne demi-douzaine de bouquins en même temps : je lisais deux ou trois chapitres de l’un, j’en ouvrais un autre que j’entamais, avant de passer à un troisième, revenant sur ceux déjà commencés… C’était l’époque de la découverte : le Rouge et le Noir, des ouvrages de Giono, Mme Bovary (première fois que je l’ai lu, je l’ai trouvé barbant à souhait ; l’effet voulu par Flaubert était atteint ; c’est mon excellent prof de Français qui m’a appris à l’aimer). Le nouveau roman, avec les Gommes de Robbe-Grillet, puis Sartre, Anouilh, etc. Quand je suis parti à dix-sept ans de chez moi, j’en ai emporté une malle pleine, laissant les moins intéressants derrière moi. A l’armée, malgré mes bonnes résolutions, je n’ai jamais pu trouver la tranquillité ni la concentration nécessaires pour me replonger sérieusement dans la lecture, surtout que mes petits camarades de chambrée voyaient ça d’un mauvais œil, s’égosillant autour d’une belote ou à dégoiser des conneries, quand je n’avais pas droit aux blaireauteries de Dimanche Martin pendant les longs tours de garde du week-end (parfois soixante-douze à quatre-vingt-quatre heures d’affilée à supporter un gars gentil mais benêt qui puait des pieds comme c’était pas possible, quand il ne fumait pas son shit). Déjà, l’armée, ce n’était pas là où on trouvait le plus de ces phénomènes « telle’tuels », mais en plus, dans un régiment d’infanterie plein d’Auvergnats basiques : garagistes, charcutiers, un croque-mort, maçons ; je faisais tache. À un moment, j’ai bien croisé un ingénieur, mais tellement blasé, tellement imbu, tellement con en définitive, que je lui préférais mes copains bas du front : ils n’étaient pas des lumières, certes, mais au moins ils étaient sympathiques.
2ème partie
Revenu au civil, ce fut la période médiéviste avec les romans de Régine Desforges, puis Milan Kundera auquel je n’entravais que pouic, et ainsi de suite au hasard d’un abonnement à France Loisirs et son achat trimestriel obligatoire. Devenu célibataire, j’ai commencé à acquérir une collection d’ouvrages reliés, qui paraissaient toutes les semaines ; avec plus ou moins de bonheur. Mais la librairie me demeurait un monde étranger, avec ses ouvrages sérieux empilés sur les tables, et le regard circonspect du tenancier binoclard. J’ai été estomaqué le jour où, ayant entendu une critique élogieuse concernant une nouvelle parution, mais dont j’avais oublié le titre, je m’aventurai dans cet antre hermétique et balbutiai ma demande approximative au vendeur. Avec un grand sourire, il me présenta un ouvrage : vous voulez parler de celui-ci ? me fit-il. Et, effectivement, c’était bien cela. Travaillant à l’époque parmi les petites mains de la pub –celles qui sont tout en bas de l’échelle, les manards-, je fréquentais les coulisses de la grande distribution. Quel ne fut pas mon choc –et ma rage rétrospective- lorsque je vis le responsable du rayon livres du Rond-Point Coop du coin arracher les couvertures des fascicules pour jeter le contenu imprimé à la benne ! Lui demandant pourquoi il procédait ainsi, il m’expliqua que, suite à accord avec les éditeurs, ils ne retournaient pas les invendus, mais juste les couvertures –qui faisaient foi- pour se faire rembourser. Et défense de toucher au bouquin, me fit-il, lorsque je déplorai le procédé, ce serait assimilé à du vol… Révulsant. Mon sort changea avec l’opportunité qui me fut offerte d’intégrer une maison d’édition, comme représentant. L’activité était marginale (j’en ai déjà parlé dans le portrait de Francis B.1 notamment), et le choix éditorial limité aux lectures, essentiellement grivoises, du patron –ne parlons pas d’éditeur. C’est ainsi que nous avions au catalogue un « onze mille verges » d’Apollinaire, un « rosier de Mme Husson » de Maupassant, tout comme des ouvrages de Sade d’un autre producteur libidineux. Mais cela m’avait mis le pied à l’étrier, et je fréquentais désormais assidument les librairies, découvrant en dehors de la soupe promue au vingt heures ou par les émissions télé complaisantes, en piles, quelques pépites inconnues. Bien évidemment, je recevais en spécimen les parutions, ce qui me valut rétrospectivement quelques sueurs froides. Ainsi d’un bouquin ânonné, bourré de cuirs et de velours, bref une merde que j’avais bien pré-vendu. Je me mis aussitôt en devoir de rappeler tous mes clients, leur demandant de me retourner les ouvrages reçus ; un bon nombre se récrièrent, me disant qu’ils l’avaient bien vendu ; je leur exposai donc le cas, leur rappelant que je n’avais assurément pas le droit de refuser de vendre, mais à la condition de prévenir de la piètre qualité de cette merde, qui s’avérait une piteuse contre- publicité, et qui me torpillait des années de patience et d’investissement qualitatif. Plus tard, un autre éditeur m’inonda de services de presse. J’en avais dans tous les coins. Quand nous quittâmes Grenoble, j’en jetai une voiture pleine à la benne, ne sachant qu’en faire (je n’avais pas pensé à Emmaüs ou une autre association, j’avoue). Tout cela pour dire que ma bibliothèque était désormais bien pourvue. Mes fils, depuis leur âge le plus tendre, ont toujours baigné dans les bouquins. On leur faisait la lecture en les mettant au lit le soir. Et pourtant, ce n’est pas pour autant qu’ils ouvraient des bouquins en dehors de leurs obligations scolaires, et encore, quelle galère ! Ils ont toujours préféré la télé ou les jeux sur PC ou PS… Triste génération. Après mon divorce, j’entrepris de revendre mes bouquins lus sur les marketplaces d’Amazon et de la FNAC. Au début, ça baignait, et j’en arrivais à dégager sur l’année un petit bénéfice qui me permettait d’emmener mes gamins...




