E-Book, Französisch, Band 3, 332 Seiten
Reihe: Stella Incognita
Goffette Science-fiction et mondes urbains
1. Auflage 2022
ISBN: 978-2-322-46822-5
Verlag: BoD - Books on Demand
Format: EPUB
Kopierschutz: 0 - No protection
E-Book, Französisch, Band 3, 332 Seiten
Reihe: Stella Incognita
ISBN: 978-2-322-46822-5
Verlag: BoD - Books on Demand
Format: EPUB
Kopierschutz: 0 - No protection
la science-fiction aime à s'emparer de la ville, qui en devient un personnage avec ses traits de caractère et ses humeurs. Souvenons-nous de Blade Runner (R. Scott) et de son Los Angeles lépreux, de la ville basse et de la ville haute de Gunnm (Y. Kishiro) ou du Roi et l'oiseau (P. Grimault), de la ville cachée des Seigneurs de l'Instrumentalité (C. Smith), de la ville panoptique de Nous autres (E. Zamiatine) ou de La Zone du dehors (A. Damasio), de la ville-immeuble hypersexuelle des Monades urbaines (R. Silverberg), de la ville-planète de Trentor (I. Asimov) ou Coruscant (G. Lucas), de la ville pourrissante de I Am Legend (R. Matheson) ou de La Foire aux immortels (E. Bilal), de la ville fiévreuse de Paris au XXe siècle (J. Verne) ou de Brüsel (F. Schuiten et B. Peeters), etc. La science-fiction rêve la ville et déploie ses imaginaires multiples. Elle le fait en s'emparant à la fois de sa matière (immeubles, réseaux, tuyaux, voiries...), de ses strates historiques (symboles, traces, plans...) et de ses projections vers l'avenir (rénovations urbaines, métamorphoses sociétales...). C'est une rêverie de chair, d'amour et de haine adressée à la ville, un révélateur des foisonnements potentiels infinis des villes. Ce livre collectif ne prétend à aucune exhaustivité, mais il montre déjà l'extraordinaire richesse des mondes urbains dans la science-fiction sous toutes ses formes (livres, bande dessinée, film, série, jeu vidéo, arts).
Jérôme Goffette est maître de conférence à la Faculté de Médecine Lyon-Est de l'Université Claude Bernard Lyon 1. Il est membre du laboratoire "Environnement, Ville, Société" (EVS, UMR 5600)
Autoren/Hrsg.
Weitere Infos & Material
Les villes dans le cinéma de science-fiction de Steven Spielberg : de l’ordinaire à l’extraordinaire Henri Larski LIS (Littératures, Imaginaire et Société), Université de Lorraine La filmographie de Steven Spielberg embrasse les genres les plus différents : le film de guerre, le film historique, le film d’aventures, mais c’est vers la science-fiction que le réalisateur est revenu le plus souvent. Qu’il convoque des visiteurs de lointaines galaxies ou des futurs dystopiques, Spielberg a toujours ancré ses films de science-fiction dans une réalité quotidienne tout en lui conférant une dimension fantastique. Le héros spielbergien est le plus souvent un personnage ordinaire. Il vit dans une ville à son image : pavillonnaire, mais quelconque dans Rencontres du troisième Type1 et E.T.2, banlieusarde et triste dans La Guerre des Mondes3, désespérante dans Ready Player One4, partagée entre vestiges du passé et technologie futuriste dans A.I.5 et Minority Report6. Contemporaines ou futuristes, les villes des films de science-fiction de Spielberg sont traversées de lumière(s), les lumières du quotidien (les phares automobiles, les enseignes commerciales, les maisons d’habitations, les écrans de télévision) qu’on ne remarque plus et les lumières « sidérantes » (et sidérales) que seuls les héros spielbergiens peuvent voir. Ces dernières provoqueront un chaos intérieur modifiant en profondeur la perception qu’ils ont de leur ville. Le monde urbain deviendra alors si pesant qu’il sera vital pour eux de le quitter ou il se transformera, au contraire, en lieu de tous les possibles, de toutes les aventures dont ils avaient été privés. Dès lors, le héros sera invité à reconsidérer son monde comme un monde de signes. Il devra réévaluer la banalité de son quotidien (sa maison, sa ville) pour y déceler tout ce qui pourrait l’aider à les déchiffrer. Un dialogue permanent s’installera entre l’ordinaire et l’extraordinaire, faisant écho à la nature même de l’écriture filmique du cinéaste : formidablement spectaculaire tout en étant profondément intime. On tentera de comprendre comment d’un film à l’autre ces deux tendances, loin de s’opposer, se nourrissent, en mesurant les correspondances qu’entretiennent les personnages et leur cadre urbain, qu’ils soient contemporains comme dans Rencontres du troisième Type ou futuristes comme Ready Player One. On montrera comment dans chaque film, la quotidienneté urbaine dissimule une étrangeté propre aux surgissements d’événements extraordinaires, avec des plans qui interrogent les reflets (préfigurant, par exemple, le survol de vaisseaux lumineux) et les sons (précédant le plus souvent des images de cinéma dont le choix sera opératif dans la narration). On s’attarda sur la manière dont les villes « ordinaires » (y compris celles imaginaires pour les films d’anticipation) se transforment dans chaque film en « ville-lumière » (surtout quand elles accueillent des étrangers « célestes ») avant de se métamorphoser en « villecinéma » (particulièrement dans les films d’anticipation où les possibilités de projection se multiplient à l’infini jusqu’à prendre le dessus sur la réalité comme dans Ready Player One). La progression de ce corpus trouvera sa pertinence dans une approche chronologique qui a le mérite de souligner le processus évolutif de son rapport au cinéma de science-fiction. Rencontres du Troisième type :
quand le merveilleux surgit dans la banlieue Rencontres du troisième Type est le premier film de science-fiction de Steven Spielberg. En décalage avec la tendance des années 1970 dominée par les films-catastrophes ou les films d’anticipation au futurisme inquiétant, le film rompt également avec la noirceur relative des premières oeuvres du cinéaste. Avec Rencontres du troisième Type, Spielberg inaugurait son cinéma de l’émerveillement, essentiellement symbolisé par l’irruption de la lumière : la lumière aveuglante lorsque la soucoupe silencieuse passe audessus de la camionnette de Roy Neary ou celle qui « invite » le petit Barry à un voyage dans l’espace. L’intention est de faire rêver. Le monde spielbergien de Rencontres du troisième Type suppose la foi. Ce besoin de faire croire, François Truffaut le signalait dans sa préface à L’Aventure Spielberg7 de Tony Crawley en expliquant que le succès de Rencontres du troisième type trouvait sans doute son origine dans le don très spécial que possède Spielberg de donner de la plausibilité à l’extraordinaire : Si vous analysez le film, vous verrez que Spielberg a pris soin de tourner toutes les scènes de la vie quotidienne tandis que, sur l’autre plateau de la balance, il donnait le plus possible de quotidienneté aux scènes fantastiques.8 La rencontre avec les extraterrestres doit donc être envisagée comme une échappatoire au monde environnant. De cette ambition narrative découle donc le choix des personnages et des lieux qu’ils occupent. Dans Rencontres du troisième Type, Roy Neary est un père de famille qui exerce la profession banale d’électricien. Il est l’incarnation de « Monsieur Tout-le-Monde » avec son mode de vie spécifique, à la périphérie des grandes villes. Le petit pavillon de banlieue9 se transforme en lieu fondateur du film de sciencefiction spielbergien. La banlieue pavillonnaire avec ses centaines d’habitations parfaitement alignées et construites sur le même modèle frappe d’abord par la monotonie qu’elle dégage, une monotonie dont la dimension communautaire s’impose dans le plan d’ensemble de nuit montrant les lumières de tous les pavillons allumées, comme si à l’intérieur de chacun, la vie était la même : une famille où la télévision tourne en permanence sans que personne ne la regarde vraiment, avec des enfants cassant leurs jouets, un père de famille essayant d’expliquer un exercice de mathématique à son fils avec un train électrique. Pourtant, au milieu de ce désordre, le merveilleux peut surgir à tout moment : quand Roy s’oppose à sa femme pour laisser les enfants regarder Les Dix Commandements10, quelques notes de la partition d’Elmer Bernstein se font entendre, la possibilité d’un ailleurs est alors évoquée ; quand il cherche à convaincre quelques minutes plus tard ses enfants d’aller voir Pinocchio11 au cinéma, l’éventualité d’une quête est suggérée. Ce n’est sans doute pas un hasard si Roy sera appelé dans la foulée pour rétablir le courant, coupé par des ovnis malicieux qui s’amusent à éteindre des repères lumineux aussi « essentiels » pour l’habitant que celles de McDonald et Shell. Dans la banlieue pavillonnaire nord-américaine, lieu où l’obscurité naturelle n’existe plus, l’absence de lumière rappelle le manque de repères spatiaux. Il n’est donc pas étonnant que Neary se perde au volant de sa voiture, incapable de retrouver son chemin. Les maisons ont disparu, seules quelques boîtes aux lettres restent visibles au bord de la route. C’est le lieu et le moment où Neary va passer de l’obscurité à la lumière, du néant à l’existence. L’irruption des rayons lumineux sur la voiture va plonger Neary dans une nouvelle dimension. Lui qui espérait le retour de la lumière pour retrouver son chemin va être embarqué dans une quête d’un ailleurs merveilleux que sa vie banlieusarde lui a toujours refusée. La ville « ordinaire » ne se transforme pas encore en « ville-lumière », mais cette première rencontre invite Neary à en prendre la direction : une « villelumière » céleste et nomade, la Mothership dont il ne soupçonne pas encore l’existence et qui viendra à lui derrière une montagne tout aussi étrangère, la Devil’s Tower. La diffusion des Dix Commandements signalée précédemment doit donc être déchiffrée a posteriori comme un signe. La...