E-Book, Französisch, 240 Seiten
Bonnet Olympia Morata
1. Auflage 2023
ISBN: 978-2-322-48093-7
Verlag: BoD - Books on Demand
Format: EPUB
Kopierschutz: 6 - ePub Watermark
Un épisode de la Renaissance et de la Réforme en Italie
E-Book, Französisch, 240 Seiten
ISBN: 978-2-322-48093-7
Verlag: BoD - Books on Demand
Format: EPUB
Kopierschutz: 6 - ePub Watermark
Enfant surdouée qui composait des poésies en grec ancien à l'âge où les autres jeunes filles jouent encore à la poupée, Olympia Fulvia Morata (1526-1555) a passé sa prime jeunesse à cour de Ferrare, où malgré son origine modeste, elle fut l'amie de Renée de France, de sa fille Anne, et d'autres personnages élevés en dignité. Adulée pour ses talents exceptionnels Olympia serait devenue une sommité littéraire de la Renaissance, sans l'intervention de la Providence divine qui avait d'autres plans pour elle. Son père se convertit au protestantisme ; puis bientôt elle-même fut gagnée aux idées de la Réforme ; dès lors, ce fut la disgrâce, la persécution, l'exil. Jules Bonnet (1820-1892), historien du protestantisme, nous raconte les deux parties de la vie de cette femme extraordinaire, dont le nom serait resté sans lui encore plus inconnu du grand public. Il joint à son récit une série de lettres qui nous permettent d'apprécier la spiritualité de l'écrivaine, et la réalité de son amour pour Jésus-Christ ; si l'hagiographie de la Réforme protestante se cherchait des icônes féminines, Olympia Morata mériterait certainement de l'être. Cette numérisation ThéoTeX reproduit le texte de 1856.
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1539-1543 Fulvio Peregrino Morato. Enfance d'Olympia Morata. Ses talents précoces. Sa célébrité. Elle est appelée à la cour, comme compagne d'Anne d'Este. Etudes brillantes, rapides progrès. Les Paradoxes de Cicéron. Félicitations de Celio Calcagnini. Profession poétique d'Olympia. Enthousiasme des savants pour leur élève. Eloges de Giraldi. Ecole du palais. Voyage du pape Paul III à Ferrare. Les Adelphes de Térence. Episode caractéristique de ce temps. Parmi les personnages distingués dont la présence ornait alors la cour de Ferrare, on remarquait le professeur Fulvio Peregrino Morato. Né dans la patrie de Virgile, à Mantoue, vers la fin du quinzième siècle ; entraîné par un penchant irrésistible à l'étude des lettres antiques, dont le réveil annonçait partout l'avènement d'une civilisation nouvelle, il enseigna successivement et avec éclat dans les plus célèbres universités d'Italie. La renommée de son savoir et de ses vertus attira sur lui l'attention d'Alphonse d'Este, qui le nomma précepteur de ses deux fils, Hippolyte et Alphonse, frères d'Hercule, qui devait lui succéder. Il parut dès lors à la cour et dans les écoles publiques, où ses talents lui acquirent l'estime des savants et des poètes qui recherchèrent à l'envi l'honneur de son suffrage. Le cardinal Bembo lui-même se montra jaloux de ses éloges, et dans une lettre à Bernardo Tasso, il se plaignit d'un jugement peu flatteur que Morato avait prononcé sur ses ouvrages en prose. Cette plainte, assez amèrement exprimée, n'occasionna d'ailleurs qu'un refroidissement passager entre deux hommes faits pour s'estimer l'un l'autre, et dans une lettre, écrite peu d'années après, on voit Bembo remercier Morato de l'envoi de quelques vers « aussi élégants que spirituels. » Il est vrai qu'ils contenaient un éloge délicat à l'adresse du cardinala. L'auteur de ces vers était alors éloigné de Ferrare, et cet éloignement, dont on ne peut pénétrer la cause, ressemble à une disgrâce, peut-être à un exil. L'ancien précepteur des jeunes princes d'Este, se retira d'abord à Vicence où son passage fut marqué par de brillantes leçons, et par quelques sonnets en langue vulgaire, composés en l'honneur d'une dame de cette ville, Catarina Pluena. Il se rendit ensuite à Venise, où ses travaux sur Dante et Pétrarque lui assuraient d'avance un accueil distinguéb. Il y passa plusieurs années dans la retraite et l'étude, pendant que ses amis attristes de son absence, ne cessaient de solliciter son rappel à la cour du duc d'Este. Leurs démarches longtemps infructueuses furent enfin couronnées de succès, et Morato, rappelé dans sa patrie adoptive, ne tarda pas à recevoir les félicitations de ses admirateurs et de ses disciples. « Vous allez donc retourner, lui écrivait l'un d'entre eux, dans cette noble cité qu'arrose le roi des fleuves, l'antique Éridan, heureux de retrouver la faveur du prince, le commerce des Guarini et des Calcagnini, et l'entretien plein de douceur de tant de personnages savants. Puissent les vents en rapporter quelque chose à l'oreille des Immortels ! » A peine de retour à Ferrare (juin 1539), Morato reparut dans les écoles où son absence avait laissé un vide profond, et ses lectures inspirées par une connaissance profonde de l'antiquité, unie au goût le plus pur, y excitèrent les mêmes applaudissements. Ce n'était pas là cependant l'unique emploi de l'activité, dont il aimait à réserver la meilleure part pour une moitié ignorée de sa vie. Durant les loisirs que lui laissaient l'enseignement public, et de nombreuses relations au dehors, il se recueillait dans son intérieur visité par quelques amis, sans cesse embelli par la piété de sa femme Lucrezia, par la tendresse de ses enfants, et surtout par les talents précoces d'une fille, dont l'éducation était l'objet de ses plus douces prédilections de savant et de père. Olympia, tel était son nom, avait reçu du ciel, dans une riche mesure, les dons qui excitent l'admiration des hommes, et la grâce qui semble pouvoir désarmer l'envie. Née à Ferrare, en 1526, ses yeux s'ouvrirent pour la première fois, son âme s'éveilla, pour ainsi dire, dans ce monde de classiques souvenirs où vivait son père, et où se rencontraient, comme dans une commune patrie, les docteurs de la Renaissance. Dès l'âge le plus tendre, elle entendit prononcer le nom de ces écrivains de la Grèce et de Rome, dont le génie longtemps voilé présidait à la résurrection littéraire de l'Italie. Elle balbutia leur langue, se nourrit de leurs pensées, s'inspira de leurs sentiments et de leurs images. Fulvio était fier de sa fille ; il ne se lassait pas de cultiver, avec une sorte d'ivresse, les talents dont elle était douée ; de lui prodiguer, avec une ardeur jalouse, ses encouragements et ses leçons. Elle reçut toutefois les premières leçons de grec d'un professeur étranger, Chilian Sinapi, qu'elle aima comme un second père, et ses progrès furent si rapides, qu'en peu de mois elle sut parler la langue d'Homère et celle de Virgile, avec une égale facilité. Le nom d'Olympia Morata ne tarda pas à franchir l'humble enceinte de la maison paternelle. Elle atteignait à peine sa douzième année, et déjà l'éclat de son savoir, la vivacité de son esprit, relevée par la candeur de l'enfance, attiraient autour d'elle un cercle d'auditeurs bienveillants et charmés. On y remarquait Lilio Giraldi, Bartolomeo Riccio, les deux frères Jean et Chilian Sinapi, venus du fond de l'Allemagne pour enseigner, à Ferrare, la langue grecque et la médecine. Elle s'entretenait librement avec eux, répondait à toutes leurs questions, et les étonnait par ses réparties aussi promptes qu'ingénieuses. Le plus empressé de tous ces savants était Celio Calcagnini, à la fois mathématicien, archéologue et poète, uni par les liens d'une intime amitié à Peregrino Morato. Depuis le jour où il avait chargé son ami, alors relégué à Vicence, « de déposer un baiser sur le front de cette muse enfantine, » son admiration pour elle n'avait fait que grandir avec les années. Il aimait à l'entendre, à l'interroger, à suivre ses progrès d'un œil complaisant ; à saluer, sous les traits d'une vierge à peine adolescente, une « Diotime » nouvelle, une « Aspasie » plus pure que celle dont les Athéniens avaient adoré et brisé l'image : « La faveur des Muses, lui écrivait-il, fut pour toi un héritage domestique ; tu suças l'amour de la poésie avec le lait qui te nourrit, et, par un mystère divin, tu puisas à la même source la vie de l'esprit et celle du corps. » Ainsi s'écoula l'enfance d'Olympia, partagée entre les affections de la famille et la culture des lettres, qui lui donnèrent une précoce célébrité. Sans mépriser les soins de l'intérieur modeste dans lequel elle était née ; sans négliger ses devoirs envers trois jeunes sœurs, dont elle fut plus tard la seconde mère, la fille de Morato se sentait entraînée invinciblement à des préoccupations d'une nature plus élevée. Elle aurait voulu se consacrer sans réserve à l'étude, jouir de l'intimité non interrompue des poètes dont elle composait la société idéale de sa vie. Mais les nécessités d'une condition médiocre la ramenaient des hauteurs où son imagination planait librement, aux exigences, peut-être aux douleurs de la réalité. Il fallait interrompre une étude commencée, fermer un livre favori, pour accomplir en silence une tâche ingrate ou obscure. La destinée d'Olympia, ainsi enchaînée à d'irréconciliables devoirs, aurait paralysé tôt ou tard l'essor de ses facultés, si la Providence ne l'avait appelée de bonne heure sur un théâtre plus digne de ses talents. L'éducation d'Anne d'Este, fille aînée de la duchesse de Ferrare, était alors le sujet des plus actives sollicitudes de sa mère. Jalouse de développer, par de savantes leçons, l'esprit distingué de sa fille, Renée avait réclamé le concours des maîtres les plus habiles : ils s'étaient rendus avec empressement à cet appel. Anne, initiée par leurs soins aux secrets des langues grecque et latine, comme aux délicatesses de la langue italienne, répondait dignement aux espérances qu'elle avait fait naître. A l'âge où les enfants connaissent à peine l'idiome maternel, elle récitait des fragments choisis de Démosthène et de Cicéron ; elle traduisait les fables d'Esope. Il ne manquait à ses études brillantes, mais solitaires, qu'une compagne destinée à les partager, en accélérant les progrès de la princesse, par une émulation voilée d'amitié. Renée avait souvent entendu parler de la fille de Morato ; peut-être l'avait-elle vue : ce fut sur elle qu'elle jeta les yeux, pour en faire la compagne et l'amie de sa fille. Ce choix si flatteur parut moins une distinction à Olympia, qu'une délivrance. Elle soupirait, sans oser peut-être se l'avouer elle-même, après les loisirs d'une vie privilégiée, dont toutes les heures seraient vouées au culte des lettres ; et, par un concours de circonstances inattendues, la barrière qui semblait la séparer à jamais de la réalisation de ce rêve, venait de s'abaisser. Elle pourrait désormais se livrer à ses méditations favorites, acquérir chaque jour des connaissances nouvelles, obéir en même temps à ses inclinations et à ses devoirs. Celio Calcagnini, dont l'influence n'avait pas été sans doute étrangère à la détermination de la duchesse, put féliciter sa jeune amie et lui offrir à la fois ses conseils et ses vœux : « Tu peux désormais te livrer à tes études préférées, échanger la quenouille contre la plume, les étoffes de lin contre les livres, l'instrument de la couture...