Gelz / Wehr | Biofictions ou la vie mise en scène | E-Book | sack.de
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E-Book, Französisch, Band 49, 263 Seiten

Reihe: edition lendemains

Gelz / Wehr Biofictions ou la vie mise en scène

Perspectives intermédiales et comparées dans la Romania

E-Book, Französisch, Band 49, 263 Seiten

Reihe: edition lendemains

ISBN: 978-3-8233-0300-8
Verlag: Narr Francke Attempto Verlag
Format: EPUB
Kopierschutz: 6 - ePub Watermark



Source de multiples innovations esthétiques depuis le début des années 2000 au moins, le genre hybride des biographies fictionnelles ou fictions biographiques a conquis des parts de marché considérables sous différentes formes littéraires et médiales: romans, biopics au cinéma ou à la radio, bandes dessinées, ou encore constructions biographiques sur les réseaux sociaux. C'est sous la forme de leurs différentes médialités que seront considérées les biofictions, dans ce volume qui réunit des spécialistes francais et allemands de la question. Les exemples proviendront de différentes littératures de la Romania, pour prendre en compte la mondialisation croissante d'un phénomène littéraire jusqu'à présent essentiellement analysé dans le contexte de la littérature francophone.

Prof. Dr. Andreas Gelz lehrt spanische und französische Literaturwissenschaft an der Albert-Ludwigs-Universität Freiburg. Prof. Dr. Christian Wehr lehrt spanische und französische Literaturwissenschaft an der Julius-Maximilians-Universität Würzburg.
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De l’individu problématique au sujet multiple
Réflexions sur l’éclatement de la „forme biographique“
Dominique Rabaté
La notion de „biofiction“ reste problématique, et nous sommes réunis pour en préciser les contours. Mais la fortune et la variété des textes ou des films (biopics) récents qui mettent en scène une vie réelle en recourant aux moyens de la fiction imposent de trouver les outils pour analyser ce type d’œuvres. Je partirai de la double définition que propose Alexandre Gefen,1 qui rappelle que le mot vient d’Alain Buisine. Il distingue deux perspectives puisque la catégorie s’étendra à „tout texte littéraire dont le cadre narratif épouse celui de la biographie“, mais aussi à „tout récit biographique dont l’appartenance à la littérature est patente“. Gefen garde donc au mot son hybridité constitutive, en indiquant que c’est bien la frontière entre récit factuel et récit fictionnel qui est mise en cause, dans une articulation mouvante entre le „bios“, la vie, et le vaste empire de la fiction (terme qui en est venu en France, sur le modèle anglo-saxon, à s’imposer au détriment de la vieille catégorie du roman). Ce qui est donc d’emblée au premier plan, c’est la possibilité de donner une forme à ce „bios“, à une vie ou à la vie, dans sa capacité à être encore organique, sinon unitaire ou unifiable. C’est-à-dire: une vie qui peut justement se plier à une forme (de récit) qui la totalise, en lui donnant des contours singuliers et caractéristiques. C’est dans cette large perspective de ce que peut être une „forme biographique“ que je voudrais tracer un parcours hypothétique, un chemin entre théorie et histoire littéraire, dont j’emprunte le modèle et le concept à Georg Lukács. Je partirai donc de ses réflexions sur le roman pour voir comment sa catégorisation se trouve débordée par les inflexions plus récentes du biographique. 1.Lukács et la „forme biographique“ du roman
Je reviens donc au livre de Lukács devenu un classique: La Théorie du roman.2 Ce n’est pas ici la distinction très hégélienne entre l’épopée et le roman qui m’intéresse, selon l’opposition systématique du monde clos au monde ouvert, de la transcendance fondant une collectivité à l’immanence de l’individu. On se souvient que Lukács fait de l’individu problématique le centre et le moteur du roman, parce que c’est précisément ce qui ouvre le roman à l’aventure et à la quête, au déploiement réel du temps comme durée de l’épreuve subjective. Le héros romanesque cherche le sens de sa vie qui reste ouvert à l’horizon de ce qu’il va vivre. De ce schéma à la fois simple et puissant, découle aussi une histoire des formes romanesques, qui se cherchent selon des essais plus ou moins réussis pour donner à la quête sa plus exacte structure. Le théoricien voit ainsi dans la découverte de l’adéquation du roman à la „forme biographique“ une solution idéale à son risque d’inachèvement interne. Il souligne ainsi: La forme du roman est essentiellement biographique. Le caractère organique auquel tend la biographie est seul en mesure d’objectiver le flottement entre un système de concepts qui laisse constamment échapper la vie et un complexe vivant toujours incapable d’atteindre au repos d’un achèvement de soi où l’utopie deviendrait immanence. (Lukács 1989:?72) Nourri des discussions philosophiques allemandes, Lukács recourt massivement au concept de vie et voit donc dans le modèle biographique une sorte de position de compromis entre la généralité trop vaste du concept et la dispersion du vécu immédiat. Il poursuit en notant: „Dans la forme biographique, la réalité singulière, l’individu que façonne l’écrivain, possède un poids spécifique qui serait trop lourd pour l’universelle souveraineté de la vie et trop léger pour celle du système“ (ibid. 72). Le romancier fait de l’individu problématique le cœur de sa création parce qu’il lui délègue, pour ainsi dire, la tâche de mener à bien son parcours fictif. C’est le héros en quête de la totalisation du sens ouvert de sa vie qui incarne ce compromis dynamique. Car il reste pris dans le tiraillement entre une unité organique perdue et une totalité qui reste tangentielle. Lukács le résume encore de cette façon: „À l’aspiration irréalisable et sentimentale, aussi bien vers l’unité immédiate de la vie que vers l’ordonnance universellement englobante du système, la forme biographique confère équilibre et apaisement: elle le transforme en être“ (ibid. 72). Prolongeant sa démonstration, Lukács en vient à nommer le produit de ce compromis romanesque: C’est ainsi que dans la forme biographique on voit s’établir un équilibre entre deux sphères de vie, l’une et l’autre ineffectuées et inaptes isolément à s’effectuer; on voit surgir une vie nouvelle, douée de caractères propres, possédant sa perfection et sa signification immanente encore que sur un mode paradoxal : la vie de l’individu problématique. (ibid. 73) C’est donc la „forme biographique“ qui conjure le risque du mauvais infini romanesque, c’est-à-dire l’inachèvement programmé des romans pastoraux ou baroques du dix-septième siècle dont le caractère fondamentalement épisodique ne réussit pas à trouver de délimitation interne. On le vérifie aussi dans les œuvres où la narration s’organise simplement par le relais des narrateurs, comme dans le Décaméron ou l’Heptaméron. Il faut ajouter que cette impossibilité de trouver un achèvement (extérieur aussi bien qu’intérieur) tient justement au trait essentiel de l’individu problématique: c’est qu’avec lui s’est perdu le caractère immédiatement organique de l’existence. L’adjectif „problématique“ n’est pas une simple redondance, mais une définition brillante de ce qui fonde l’individualisme moderne occidental. Le héros ne reçoit plus de détermination constitutive comme dans l’épopée. Il doit affronter l’existence en recherchant ce qui lui donne sens. Réunissant histoire littéraire et surplomb théorique, Lukács parvient à expliquer magistralement pourquoi le roman européen, prolongeant les découvertes du dix-huitième siècle autour du roman de formation, cristallise ainsi au dix-neuvième siècle un modèle romanesque réaliste qui prend pour objet principal la vie de son personnage, personnage qui lui donne le plus souvent son nom pour titre. Une partie importante des œuvres produites à l’époque peuvent s’intituler comme le livre de Maupassant: Une vie. Sur un mode plus abstrait, Lukács peut alors synthétiser sa thèse centrale dans ce résumé typique de son style: La forme biographique signifie pour le roman la victoire sur le mauvais infini ; d’une part, les dimensions du monde s’y réduisent à celles que peuvent assumer les expériences vécues par le héros, et la somme de celles-ci est organisée par l’orientation que prend la marche du héros vers le sens de sa vie qui est connaissance de soi ; d’autre part, la masse hétérogène et discontinue d’hommes isolés, de structures sociales sans signification et d’événements dénués de sens qui apparaissent dans l’œuvre, reçoit une articulation unitaire par la mise en rapport de chaque élément avec la figure centrale et avec le problème vital que met en lumière le cours de son existence. (ibid. 76–77) Il me fallait rappeler un peu longuement le raisonnement ordonné de Lukács pour souligner la place stratégique de la „forme biographique“ dans son modèle. Pour ma part, je veux en retenir l’équilibre dynamique qu’il confère sur une longue durée au roman. Le roman se fait exploration du thème existentiel de l’individu problématique si on veut gloser La Théorie du roman avec un vocabulaire emprunté à Kundera. La totalisation problématique du sens de sa vie est atteinte dans la mesure où le roman nous conduit jusqu’au terme de son existence et nous fait assister le plus souvent à la mort du héros ou de l’héroïne. C’est là que se dénoue ou que s’accomplit son destin ambigu. C’est par là aussi que le roman réaliste s’ouvre au „gouffre de l’intériorité“3 d’un individu qui pose la question du sens de la vie sans pouvoir y répondre. Si l’on ajoute les thèses de Walter Benjamin à celles de Lukács (dont il s’inspire souvent), comme je l’ai fait dans Le Roman et le sens de la vie,4 on complique le modèle historique du théoricien hongrois. Mais c’est encore la grande question du dilemme entre liberté et destin que continue de susciter l’entreprise romanesque. À partir de la proposition de Georg Lukács, faisons un premier pas de côté, lui aussi schématique et prospectif, tant les formes de récit qui cherchent à donner „forme“ à une vie se croisent et s’entremêlent dans des genres très divers (nécrologie, hagiographie, vies de peintres, faux mémoires). Mais il me semble qu’on peut opposer la „forme biographique“ du roman à la biographie dont elle s’inspire. Je vise ici la biographie dans son moment romantique – modèle qui va devenir canonique du genre. La vie de l’homme génial, de l’artiste, du savant ou du grand homme fonctionne en effet de façon très différente de ce que décrit Lukács pour le roman. Dans la biographie classique, le sens préexiste puisque la vie notoire est connue...


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