E-Book, Französisch, 164 Seiten
ISBN: 978-2-322-54576-6
Verlag: BoD - Books on Demand
Format: EPUB
Kopierschutz: 6 - ePub Watermark
Né en 1933, il est retraité des travaux publics. Il a déjà publié plusieurs ouvrages, notamment "Sur les traces de Jean Galmot", "La guerre de cent ans en Périgord", "Quand j'étais bidasse"
Autoren/Hrsg.
Weitere Infos & Material
Mauricette était une accorte jeune fille, presque trop belle pour être la bonne d’un curé. De trois ans ma cadette, m’avait dit sa tante. En dépit du fait que je n’étais guère plus âgé qu’elle, intimidée – j’étais monsieur le curé ! elle n’avait pas su de quelle manière se comporter et répondre à mes questions que j’avais voulu pourtant simples. C’est son humilité, et puis son désir évident de se rendre utile qui m’avait convaincu de la prendre à mon service. Tout de suite, elle se révéla très active, ménagère efficace et de bon esprit. Ayant appris avec sa mère à faire la cuisine, dès qu’elle fut à mon service, elle sut me préparer de bons petits plats. Comme convenu, elle couchait dans la chambre à côté de la mienne. Pour les repas, je ne voulais pas qu’elle reste à la cuisine et je lui avais demandé de venir à ma table. Tout d’abord, ainsi que sans doute on le lui avait conseillé, elle refusa, et puis devant mon insistance, elle vint y prendre place, en prenant soin de prendre ses distances. Ce qui me dérangeait, c’était qu’à tout de champ, elle employait avec respect le terme de monsieur le curé. Mais comment faire, je ne pouvais tout de même pas lui dire de m’appeler par mon prénom. Devant d’autres personnes, si elle en avait pris l’habitude, c’eut été malvenu. Deux ou trois mois s’écoulèrent. Non seulement je m’étais habitué à la présence de Mauricette, mais encore elle m’était devenue presque indispensable. Dans la journée, nous nous côtoyions sans cesse, et j’étais heureux de la voir oeuvrer dans la maison. Le soir, avant d’aller nous coucher, nous restions ensemble et nous avions de longues conversations, je lui parlais de la bible et je lui lisais quelques passages, en choisissant les moins scabreux de l’ancien testament ou bien les évangiles dans le nouveau. Je lui enseignais la vie de Jésus, de la Vierge Marie, des apôtres. Elle était allé à l’école du village et elle avait obtenu son certificat d’études, mais elle n’était pas allée plus loin, à l’époque, les filles qui faisaient de longues études étaient rares et presque mal vues. De temps en temps, je lui permettais de rendre visite à ses parents et, lorsqu’elle n’était pas là, je ne pouvais l’oublier, ses yeux bleus, sa taille bien prise, ses formes parfaites, sa gentillesse. La nuit, je pensais à elle et je repoussais de toutes mes forces l’envie d’aller la retrouver dans sa chambre. Etais-je devenu amoureux ? Je le craignais fort. Un sentiment qui ne pouvait convenir à ma condition ! Comment le combattre ? Renvoyer Mauricette ? Qu’elle ne soit plus là, dans ma maison, était certainement une bonne solution, mais qui m’était impensable ! C’est alors que je pensai à aller me confesser et demander conseil au père Delamare, le curé de Belvès, un brave homme d’une soixantaine d’année. - Mon fils, me dit-il, tu t’es consacré à Dieu, tu dois transformer ton penchant mal placé pour cette fille en affection. Garde-la à ton service et ton sentiment d’amour de ton prochain, dénué de tous désirs impurs, n’en sera que plus fort. Je ne demandais qu’à l’écouter, sans être vraiment convaincu d’y parvenir et finalement ce qui devait arriver arriva. Un matin, alors que je venais de terminer mon petit déjeuner et que Mauricette était assise en face de moi, je n’ai pu résister au désir de l’embrasser. Je n’osai que dans le cou. Elle sursauta et se leva. Je la pris dans mes bras et elle m’offrit ses lèvres. - C’est pas bien ce que nous faisons monsieur le curé, me dit-elle. - Arrête de m’appeler monsieur le curé, je suis Raymond, je lui répondis. Dans la journée, nous avons vaqué chacun à nos occupations habituelles, mais en évitant de nous rencontrer, l’un et l’autre étant plus ou moins gênés de notre comportement du matin. Et puis le soir, obéissant à un besoin irrésistible, je suis allé la retrouver dans sa chambre. A partir de ce jour-là, nous couchâmes dans le même lit et nous nous mîmes à vivre comme mari et femme. Pour les autres, rien n‘avait changé, nous faisions en sorte que personne ne se doute de notre liaison. Mauricette était toujours simplement la bonne de monsieur le curé Delacour. Sans doute que certains se posaient des questions : comment deux jeunes gens plein de vie peuvent vivre au quotidien sous le même toit sans succomber à la tentation ? Finalement, voulant ignorer tout ce que pouvaient penser les autres, nous étions heureux. Seulement, il fallut que quelques mois plus tard, par malheur notre idylle s‘assombrisse. Un matin je constatai que mon amie affichait un visage sombre. - Par deux fois, je n’ai pas eu mes règles, me dit-elle. Aïe ! Pensais-je. Quoi faire ? Il était nécessaire qu’elle aille au docteur pour savoir. Il n’était pas question de consulter celui du village. Suite à une affaire de malade que je considérais mal soigné, lui et moi nous n’étions pas en très bons termes et le scandale aurait certainement éclaté. C’est celui de Belvès que Mauricette rencontra et qui lui confirma qu’elle était enceinte. Voila ! J’allais être père ! Quoi faire ? Il n’y avait qu’une solution envisageable, que je me défroque et que j’épouse Mauricette. Mais par la suite qu’allais-je faire ? Mon métier c’était de dire la messe. Je n’avais pas appris autre chose. Si je créais un foyer, il faudrait bien que je lui assure un moyen de subsistance. Mais l’immédiat c’était de réparer ma faute. J’informais Mauricette de ma résolution. Je n’allais plus être prêtre et nous allions nous marier. Ce fut pour elle à la fois une grande et heureuse nouvelle, que nous nous unissions officiellement la transportait de joie, mais également un gros embarras, il fallait que je me défroque et elle n’imaginait pas que je ne puisse plus être monsieur le curé de Monpazier. En outre, elle s’était déjà mise en tête d’être fille mère avec tous les problèmes que cela comportait. Dans son esprit, il était inconcevable de se faire avorter, d’ailleurs c’était un crime passible de la cour d’assises et de plusieurs années d’emprisonnement. En fait, ce qui la tourmentait le plus, considérant que c’était elle la seule à avoir pêché, c’était que je sois obligé de poser la soutane. Je réussis tout de même à lui faire entendre raison, nous nous aimions et nous étions fait pour vivre ensemble. Dès que j’eus pris ma décision, j’écrivis une longue lettre à monseigneur l’évêque qui me répondit aussitôt. Dans sa réponse, tout en ne se privant pas naturellement de m’adresser des reproches, il me félicitait de ma franchise et de ma détermination à quitter l’ordre ecclésiastique. Il me restait à voir les parents de Mauricette. Je me rendis seul à Capdrot. J’avais mis mon costume civil et leurs mimiques me permirent de savoir qu’ils étaient fort étonnés en me voyant ainsi vêtu. Expliquer la raison de ma présence ne fut pas facile. Leur fille ne les avait pas informés de notre liaison et bien entendu encore moins de son état de grossesse. Je pris tout sur moi en disant qu’elle s’était laissée séduire et je leur demandai de me pardonner et d’accepter qu’elle devienne ma femme. Sans hésiter, ils me donnèrent leur accord. Cependant, je sentais qu’une question les turlupinait et je me doutais de quoi il s’agissait. Ce fut le père Dourcenot qui la posa. - C’est très bien, nous sommes heureux de marier notre fille, mais si vous n’êtes plus curé, comment allez-vous vivre ? Une femme, un enfant, il faut assurer leur existence. Je m’accordai un temps de réflexion qui dut leur paraître long avant de répondre. A vrai dire, dans l’immédiat je n’avais encore pas trouvé de solution. Seule ma formation intellectuelle allait peut-être me permettre de trouver un emploi chez un notaire, dans l’administration, même si, devenir un scribouillard ne me plaisait guère. En deux mots, j’expliquai tout cela aux parents de Mauricette. - Ecoutez Raymond, a dit le père de ma future...